jeudi 5 janvier 2012

Entre théâtre et cinéma, Le Havre de Aki Kaurismäki

Le Havre est un film quelque peu étrange, dans lequel l'on sent bien le lien avec le cinéma scandinave, a plus l'air d'une pièce de théâtre filmée que d'un film.
Les personnages déclament leur texte, et leur jeu ne recherche pas du tout un quelconque réalisme. Au contraire, on dirait que l'ambition de ce jeu est de camper un personnage, une idée, une impression . Les répliques sont articulées, et se font souvent attendre. Nous sommes loin du bavardage de certains films à grand public. L'éclairage n'est pas non plus celui d'un film réaliste : le personnage qui parle est mis en valeur, comme sous un projecteur. Enfin, dans l'histoire, seul ce qui peut être montrable l'est. Pas d'introspection éprouvante des caractères, pas de dépliage des situations, pas d'émotions grandiloquentes. Tout est joué dans le concret, lequel concret est également et paradoxalement rêvé. Certaines scènes n'ont pour but que de raconter l'histoire, bien que les faits ne se déroulent pas comme ça "en vrai".
Un film plein d'humour avec finalement aucun éclat de rire. Une finesse tracée à grands traits, et une émotion enfouie dans le quotidien. Pas de jugement moral non plus : les personnages ne nous font pas la leçon, ne se comparent pas les uns aux autres. Et camper ce film dans un décor supposé réaliste - des quartiers un peu pauvres du Havre, a quelque chose d'onirique, comme si un étranger plaquait sa vision sur les choses. Kaurismäki nous entraîne dans une visite de ce pays dont il ne prétend pas venir, dont il ne prétend pas tout connaître.

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