mardi 30 avril 2013

Babylone et Athènes - musarderie sur la ville

J'entends parfois que la ville serait le lieu de la perte de soi, de la perte de sens. En habitant en ville, on se condamne à vivre dans la société de consommation, à rechercher la satisfaction de bonheurs superficiels, à accepter que, quotidiennement, le nombre d'inconnus croisés sera largement supérieur au nombre de personnes déjà connues rencontrées.

La vie en ville est chère, et pour pouvoir y vivre bien, l'on se condamne à travailler, à axer son existence autour de l'argent.

Encore : la ville pue.


Pourtant, je vois plutôt la ville comme un lieu de transformation sociale. En vivant en ville, en mettant en commun les moyens, on permet à chacun de s'émanciper, relativement, des contingences du quotidien. La ville donne, au moins d'un point de vue théorique, une certaine latitude, une certaine indépendance par rapport à son groupe social d'origine.

En théorie, l'accès aux choses de l'esprit, que ce soit pour se divertir ou apprendre, est plus aisé.

Vivre en ville permet aussi une forme d'insouciance : je n'ai pas à organiser l'ensemble de mon existence autour de la satisfaction de mes besoins. Si j'ai faim, les seules choses dont je devrais vraiment tenir compte seront les horaires des magasins, boutiques ou restaurants, et, éventuellement, les jours de marché.

L'un des grands avantages de la vie en ville est sans doute l'accès facilité à la culture. Accès aux livres, aux films, au théâtre, à la musique, à la danse, aux discussions, aux expositions.

La ville, c'est aussi souvent le départ vers l'ailleurs. Elle est lieu d'arrivées et de départs, et l'on y rencontre des gens de passage, ou en escale, sur le départ, ou bien installés.

Cependant, ce que je voulais faire ici, ne consiste pas particulièrement en une énumération des avantages ou caractéristiques de la vie en ville. Non, je voulais souligner le fait que la vie en ville rend possible une réflexion sur comment vivre ensemble.

Comment vivre ensemble ? Comment répartir l'espace urbain ? Voulons-nous des voies rapides, des chemins touffus, des terrains de sports publics, des logements, des bibliothèques, des places, des cafés ? Des salles de danse, des universités, des foyers, des boutiques ? Des voies cyclables, des trottoirs, des voitures ?

Quelles règles peut-on mettre en place pour que vivre ensemble soit le plus harmonieux possible ? Que peut-on légitimement décider de mettre en oeuvre ou de limiter ?
Comment allons-nous décider ensemble de cela ?

Pour moi, la ville, c'est l'occasion de se construire ensemble un endroit que l'on partage, car cela nous rend le quotidien plus facile, plus riche. Mais cette construction ne peut se passer d'une réflexion sur comment éviter de se rendre cette vie ensemble pénible, insupportable. Et comment, même, la rendre agréable ? Peut-on lui donner un sens ?