samedi 4 août 2012

La sélection à la française

En France, le mode favori de sélection est le concours. Il y a un nombre de places limité, et seuls ceux qui "excellent" réussiront. L'excellence est d'ailleurs un terme très apprécié des Français ; il permet en effet de ne pudiquement pas indiquer le caractère injuste, socialement déterminé, voire irrationnel, de la sélection par concours. On ne devient pas excellent ; on l'est. Ainsi, le concours permet de révéler ceux dont l'excellence est encore à l'état latent.

Qui sélectionne-t-on à l'issue d'un concours ? Des gens excellents, je ne sais pas. Mais certainement des gens qui ont été soutenus par un ensemble de famille, amis, institutions. Des gens qui ont pu se dégager de l'angoisse financière pendant le temps nécessaire à cette préparation. Des gens qui ont compris que la vie est une lutte, que trop de générosité envers autrui empêche d'accomplir ses objectifs individuels, qui ont réussi à s'abstraire d'un ensemble de préoccupations pour se focaliser sur le concours. Des personnes qui résistent à une pression aussi stérile qu'épuisante. Des gens qui ont cru suffisamment en eux-mêmes pour se lancer, qui ont pris conscience que les places sont comptées, et qu'il allait falloir se battre pour avoir la sienne (même si, bien sûr, on ne réussit pas un concours tout seul).

Sont-ce réellement ces gens-là que l'on veut sélectionner pour qu'ils endossent des responsabilités, accèdent à certaines professions, prennent des décisions parfois vitales, souvent importantes ?
Pourquoi éjecter ceux qui résistent moins bien au stress et à l'angoisse, ceux qui s'organisent mal dans leur travail, ceux qui ne sont pas assez soutenus par un ou plusieurs réseaux, ceux qui ne pensent pas assez à eux ?
Est-ce légitime d'organiser une large partie du recrutement, en France, ainsi, sans tenir compte des handicaps de toute nature, des aléas de la vie, et des qualités personnelles nécessaires pour faire société ?